Le président Donald Trump signe des décisions executives - Archives Maison Blanche

Interdictions américaines : la fracture s’élargit entre Washington et ses partenaires africains

Alors que l’administration Trump justifie une nouvelle vague d’interdictions d’entrée sur le sol américain par des impératifs sécuritaires, plusieurs pays africains sont visés sans preuve d’implication dans des actes terroristes. Paradoxalement, l’Égypte dont est originaire l’auteur présumé de l’attaque ayant servi de prétexte à cette décision échappe de justesse aux sanctions. Une politique aux allures de “deux poids, deux mesures” qui fragilise les relations entre les États-Unis et leurs partenaires africains.

Le président Donald Trump signe des décisions executives – Archives Maison Blanche

Mesure à portée sécuritaire sélective

Dès le 9 juin 2025, les frontières américaines se refermeront pour les ressortissants de douze pays, dont sept en Afrique. Sont concernés : l’Afghanistan, la Birmanie, le Tchad, la République du Congo, la Guinée équatoriale, l’Érythrée, Haïti, l’Iran, la Libye, la Somalie, le Soudan et le Yémen. Sept autres pays, dont le Burundi, Cuba, le Laos, la Sierra Leone, le Togo, le Turkménistan et le Venezuela, sont soumis à des restrictions supplémentaires.

Ces mesures ont été annoncées dans la foulée de l’attaque survenue à Boulder dans le Colorado. Attaque au cours de laquelle un homme d’origine égyptienne, en situation irrégulière, a blessé douze personnes lors d’une manifestation en soutien aux otages israéliens. Cependant, l’Égypte directement concerné, ne figure pas sur la liste. Un fait qui alimente les critiques sur la nature inégalitaire de la politique migratoire américaine.

L’Afrique prise pour cible

La présence de pays comme le Congo-Brazzaville et la Guinée équatoriale dans cette liste surprend nombre d’observateurs. Aucun de ces États n’est associé à des réseaux extrémistes ou à des actions hostiles envers les États-Unis. Leur inclusion semble davantage répondre à une logique administrative que sécuritaire. Comme argument officiel, les autorités de Washington évoquent des systèmes d’immigration défaillants ou des taux élevés de dépassement de visa.

Mais au-delà de la technique, c’est la symbolique qui inquiète. Ces pays, pourtant engagés dans des relations bilatérales stables avec Washington, sont aujourd’hui assimilés à des États à risque. Une catégorisation qui peut durablement affecter les relations de confiance avec ces États, et dans plusieurs secteurs.

Des répercussions diplomatiques

Le message envoyé par l’administration américaine est clair et il faut le comprendre. Même des partenaires sans contentieux historique peuvent être exclus sans consultation préalable.

À Brazzaville, Malabo ou N’Djamena, cette décision est certainement perçue comme un désaveu, voire une humiliation diplomatique. Plusieurs chancelleries africaines s’interrogent déjà sur l’avenir de leur coopération avec Washington version Donal Trump, à l’heure où d’autres puissances comme la Chine ou la Russie multiplient les gestes d’ouverture envers le continent.

Le tournant américain pourrait également affecter les relations multilatérales. Les politiques de développement, la lutte contre le terrorisme dans le Sahel ou la coordination en matière de santé publique reposent sur un socle de confiance mutuelle. En adoptant une posture unilatérale, les États-Unis prennent le risque d’éroder ce socle, avec des conséquences à moyen terme.

De plus, les États Unis donnent les arguments aux pays africains qui depuis quelques années, se battent pour leur souveraineté à travers des initiatives de rupture et de diversification des partenariats. Une situation pas très avantageuse pour le pays de l’oncle Sam.

L’ombre persistante du “Muslim Ban” (Interdiction de musulmans)

Cette autre politique américaine d’interdiction rappelle le tristement célèbre “Muslim Ban” du premier mandat Trump, qui avait ciblé des pays majoritairement musulmans et déclenché un tollé mondial. Si la version 2025 élargit la cible à des États non musulmans, la logique reste la même ; construire une forteresse autour du territoire américain, au prix de la marginalisation de partenaires entiers.

En ne sanctionnant pas l’Égypte, pourtant directement liée à l’incident de Boulder, les États-Unis s’exposent à l’accusation d’arbitraire. Un traitement différencié qui nuit à la crédibilité de la diplomatie américaine et qui affaiblit sans doute, son image d’acteur global cohérent.

Une coopération à repenser

Si la sécurité nationale est une prérogative légitime, elle doit aussi s’exercer avec discernement. En impliquant des pays aux profils très différents, l’administration Trump brouille le message qu’elle souhaite envoyer. Pour nombre de responsables africains, cette mesure au lieu de protéger l’Amérique, l’isole plutôt davantage.

À l’heure où l’Afrique cherche à diversifier ses partenariats, des décisions similaires, pourrait précipiter un réalignement stratégique, au détriment des États-Unis.

Par YMN

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *