

Général d’armée Hubert Bonneau, Directeur général de la gendarmerie nationale française- Archives ministère de l’Intérieur (France)
Le Cameroun traverse actuellement une période critique. Le régime du président Paul Biya, au pouvoir depuis plus de 40 ans est accusé par une partie croissante de la population et de l’opposition d’utiliser les forces de maintien de l’ordre pour asseoir son autorité.
La récente expulsion du Pr Maurice Kamto, président du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) de Douala, où il a été empêché de tenir une réunion politique, en est une illustration marquante. Ce dernier a vu le domicile qui l’accueillait encercler, le siège de son parti quadrillé et plusieurs de ses militants arrêtés dans une démonstration de force interprétée comme une tentative de musèlement de l’opposition.
Dans un tel contexte, la présence à Yaoundé du patron de la gendarmerie française perçue comme un renforcement des liens entre les forces de sécurité camerounaises et françaises, apparaît malvenue et provocante. Le général d’armée Hubert Bonneau, devrait pendant les deux jours, rencontrer plusieurs autorités sécuritaires du Cameroun avec en toile de fond, l’organisation de la présidentielle d’octobre 2025.
Plusieurs voix s’élèvent déjà, à l’instar de Serge Espoir Matomba, candidat du Peuple Uni pour la Rénovation Sociale (PURS) à la prochaine présidentielle, pour dénoncer cette démarche perçue comme un soutien indirect à un régime en perte de légitimité.

Communiqué de Serge Espoir Matomba, Premier secrétaire du PURS et candidat déclaré à la présidentielle de 2025
Derrière cette visite se joue aussi une question de fond. La coopération sécuritaire internationale peut-elle encore être neutre dans un État où les forces de l’ordre sont accusées de torture (cas artiste Longue Longue), d’assassinats ciblés (cas du journaliste Martinez Zogo), et d’une instrumentalisation politique systématique ?
La symbolique de cette visite ne saurait donc être ignorée. Elle interroge sur la posture de la France face aux régimes autoritaires en Afrique francophone, et plus largement encore, sur la place accordée aux droits humains dans les relations bilatérales.
Toutefois, il ne faudrait pas ignorer le rôle et l’influence de cet officier supérieur français dans les couloirs de la diplomatie. Le Cameroun en pleine crise à un moment où les intérêts de la France sont menacés en Afrique, il n’y aurait peut-être pas mieux que le Général Hubert Bonneau, pour effectuer une telle visite ; question de se rassurer que certains intérêts Français ne souffrent de rien au Cameroun malgré le contexte.
Rappelons que Hubert Bonneau avait été choisi par Le ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères en 2017, pour mettre sur pied la direction de la sécurité diplomatique avec pour mission de structurer cette direction et de produire une doctrine afin d’organiser la sécurité des emprises diplomatiques françaises, des lycées et instituts français de l’étranger et des quelque 13 000 agents diplomatiques en France et à l’étranger.
À quelques mois d’un scrutin capital pour l’avenir du Cameroun, Yaoundé n’a pas fini de surprendre son peuple. Après la polémique ELECAM-ONU, voici venue celle du “que vient faire le patron de la gendarmerie française au Cameroun à la veille des élections ?”
Soutien sécuritaire ou caution à une dérive autoritaire ? ce déplacement diplomatique résonne comme un signal, mais lequel exactement ? C’est là où le flou persiste.
Par Yves Modeste Ngue
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